Matériel pour l’irrigation
Article présenté ici dans le cadre du programme Olea 2020 |
Le choix du matériel
- Les motivations menant à la mise en place de l’irrigation sur un verger d’oliviers sont avant tout d’ordre économique. Aussi, faut-il réfléchir à la rentabilité d’un tel investissement :
-
- – les ressources disponibles en eau sont-elles suffisantes pour accroître la production de manière significative ?
- – les gains attendus sont-ils compatibles avec les frais à engager, notamment pour l’approvisionnement de la parcelle en eau ?
- Le matériel d’irrigation à installer sur un verger d’oliviers doit être adapté aux conditions locales: disponibilités en eau (débit instantané, période de mise en eau, durée d’irrigation), surface à irriguer, relief sur la parcelle, sol rencontré, qualité de l’eau…
Goutte-à-goutte ou micro-aspersion ?
Goutte-à-goutte
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Micro-aspersion
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Coût d’installation pour une plantation d’un hectare en 6 m x 6 m |
1 600 m de polyéthylène de diamètre 16 = 1 100 € 600 goutteurs de 4 L/h = 150 € TOTAL = 1 250 € Total ne tenant compte ni de la conduite d’amenée, ni de la station de filtration, ni du porte-rampe |
1 600 m de polyéthylène de diamètre 20 = 1 600 € 300 micro-jets de 40 L/h avec tubing = 450 € TOTAL = 2 050 € Total ne tenant compte ni de la conduite d’amenée, ni de la station de filtration, ni du porte-rampe |
Gain de production en huile | Variable d’une variété à l’autre et en fonction des quantités d’eau apportées
+ 12 % au terme d’un essai mené au cours des années 1998 à 2005 sur un verger d’Aglandau planté en 1997 (2 goutteurs de 4 L/h par arbre et doses de confort) |
Variable d’une variété à l’autre et en fonction des quantités d’eau apportées
+ 34 % au terme du même essai (doses de confort) |
Besoins annuels en eau | Relativement limités : 600 m3/ha au minimum * |
Bien plus élevés qu’en goutte-à-goutte : 1 800 m3/ha au maximum * |
Besoins quotidiens en eau | jusqu’à 14 m3/ha/jour
NB: pour une meilleure efficacité, l’irrigation par goutte-à-goutte est déclenchée quotidiennement (voir le principe de l’irrigation par goutte-à-goutte) |
Plus élevés qu’en goutte-à-goutte: jusqu’à 25 m3/ha/jour
NB : en micro-aspersion, le déclenchement de l’irrigation intervient à épuisement de la réserve facilement utilisable (RFU). |
Débit instantané en entrée de réseau | Relativement limité : jusqu’à 6,4 m3/h/ha pour 4 goutteurs de 4 L/h par arbre, à raison de 400 oliviers par hectare |
Très élevé : jusqu’à 20 m3/h/ha pour 1 micro-jet de 50 L/h par arbre, à raison de 400 oliviers par hectare NB : la création de plusieurs postes d’irrigation sur la parcelle permet de réduire le débit instantané |
Pression au diffuseur | A partir de 0,5 bar | A partir de 1,5 bar |
Longévité des distributeurs | Bonne
Attention au colmatage chez les goutteurs autorégulants à faible débit Téléchargez le rapport de la Chambre d’Agriculture du Vaucluse en cliquant ici |
Moyenne à bonne
Dépend beaucoup de la qualité des piquets de soutien (métallique de préférence) Téléchargez le rapport de la Chambre d’Agriculture du Vaucluse en cliquant ici |
Finesse de fltration de l’eau | 100 μm*, tout particulièrement en présence de goutteurs autorégulants | 200 μm* |
Automatisation de l’irrigation | Indispensable pour assurer des irrigations quotidiennes | Souhaitable, voire indispensable lorsque le verger est divisé en plusieurs postes d’irrigation |
Interventions particulières | Entretien classique du réseau d’irrigation
Désherbage restreint du fait de la forte localisation des apports d’eau |
Entretien classique du réseau d’irrigation
Désherbage souhaitable du fait de la forte portée des micro-jets Couchage des micro-jets avant la récolte pour éviter la prise dans les filets |
(* Données issues de la fiche L’Eau Fertile – L’irrigation de l’olivier)
Distributeurs autorégulants ou turbulents ?
- Le goutte-à-goutte et le micro-jet sont des distributeurs d’eau conçus pour fournir un certain débit à une certaine pression. Contrairement aux distributeurs turbulents, les distributeurs autorégulants sont munis d’une membrane ou d’un circuit de régulation, qui leur permet de fournir un débit identique sur une large plage de pression généralement comprise entre :
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- – 0,5 bar et 4 bars en goutte-à-goutte.
- – 1,5 bar et 4 bars en micro-aspersion
- Deux facteurs importants influent sur les variations de pression dans un réseau d’irrigation :
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- – les différences de hauteur dues à la topographie : lorqu’on applique une différence d’altitude de 9,80 mètres à de l’eau en charge dans une canalisation sans écoulement, l’eau située à 9,80 mètres en contrebas présente une pression supérieure de 1 bar et vis versa (lien vers le théorème de Bernoulli en cliquant ici). Ainsi, lorsqu’une pompe entraîne de l’eau à 5 bars vers un point situé 20 mètres plus haut, l’eau ne présente plus qu’une pression de 3 bars une fois arrivée au point haut (si on fait abstraction des pertes de charge).
- – les pertes de charges liées au frottement de l’eau contre les parois de la canalisation. Les pertes de charge sont d’autant plus élevées que le débit d’eau est important, que le diamètre de la canalisation est réduit et que la longueur de la canalisation est élevée.
- Or on estime qu’un réseau d’irrigation est parfaitement dimensionné lorsque les variations de
débit entre le distributeur le plus favorisé en pression et le moins avantagé sont inférieures à 10 %. Ainsi, lorsqu’on prévoit d’installer du goutteur de 4 L/h sur un verger, la différence de débit constatée sur l’ensemble du réseau doit être inférieure à 0,4 L/h.
- Les distributeurs autorégulants présentent donc deux avantages : celui de disposer d’une fourniture d’eau homogène et celui de simplifier le dimensionnement du réseau d’irrigation. Toutefois, les distributeurs autorégulants sont sensibles au colmatage, tout particulièrement les goutteurs à faible débit (2,5 L/h et moins). Pour connaître les performances de divers matériels, téléchargez le rapport de la Chambre d’Agriculture du Vaucluse en cliquant ici. Les cas de colmatage sont essentiellement rencontrés en présence d’eau calcaire ou chargée en limons, algues ou matière organique. D’autres causes peuvent être attribuées au colmatage des distributeurs comme l’insuffisance d’entretien du réseau ou une filtration inadaptée à la qualité des eaux. Autre inconvénient : le prix, souvent bien supérieur aux distributeurs turbulents.
- En l’absence de membrane ou de circuit de régulation, les distributeurs turbulents sont généralement bien moins sensibles au colmatage. Ce type de distributeur conviendra d’avantage aux parcelles à faible relief et pour un réseau conçu pour minimiser les pertes de charge, à faible longueur de rampe de préférence.
- En faisant le choix d’un distributeur turbulent, on accepte des variations de débit sur la parcelle. L’olivier ne nécessite pas une conduite d’irrigation aussi précise qu’en maraîchage. Aussi, les écarts de débit sont-ils acceptables à condition qu’ils restent inférieurs à 25 – 30 %. Plus les variations de pression rencontrées sur le réseau sont importantes, plus l’hétérogénéité de débit aux distributeurs est forte sur la parcelle. Comme le montre le graphique ci-dessous représentant la courbe débit – pression d’un goutteur bien spécifique, le débit au goutteur augmente de 0,8 L/h, soit de 40 %, pour une pression passant de 1 bar (10 mCE) à 2 bars (20 mCE).
Distributeur autorégulant | Distributeur turbulent | |
Faible dénivelé sur la parcelle | ☺ | ☺ |
Fort dénivelé sur la parcelle | ☺ |
☹ |
Faible longueur de rampe | ☺ | ☺ |
Forte longueur de rampe | ☺ |
☹ |
Eau d’irrigation peu ou pas chargée en limons ou en calcaire | ☺ | ☺ |
Eau d’irrigation calcaire ou chargée en limons, algues ou matière organique |
☹ |
☺ |
Choix d’un goutteur de faible débit |
☹ |
☺ |
Quel débit au distributeur ?
- Plusieurs facteurs sont à prendre en compte avant de choisir le débit du distributeur :
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- – la diffusion de l’eau dans le sol,
- – la perméabilité du sol,
- – le débit instantané disponible en entrée de réseau et le nombre envisagé de postes d’irrigation,
- – la durée du tour d’eau.
- La diffusion latérale de l’eau dans le sol est bien meilleure en sols argileux qu’en sols sableux. Par conséquent, la constitution d’un bulbe humide est bien plus aisée dans les sols argileux. En
sols sableux, la capacité de réserve en eau est limitée (voir l’article sur l’eau dans le sol); de plus, l’eau a tendance à percoler d’où des risques non négligeables de pertes en profondeur. Pour y remédier, il est possible de déclencher les irrigations plus fréquemment à des doses réduites. L’autre solution consiste à accroître le volume de sol humide grâce à un matériel adapté aux sols sableux :
-
- – en goutte-à-goutte : privilégier les goutteurs de faibles débits (moins de 3 L/h). En contrepartie, on augmente le nombre de goutteurs par arbre afin de satisfaire les besoins en eau de l’olivier. Attention toutefois aux risques de colmatage des goutteurs !
- – en micro-aspersion : préférer des modèles à longue portée de jet.
- En sols argileux, il n’est pas rare que l’eau stagne, voire ruisselle, en surface sous le distributeur, ce qui conduit à des pertes d’eau par évaporation et/ou à une mauvaise tenue du bulbe humide. Pour remédier à ces problèmes de perméabilité, certains matériels apportent une solution satisfaisante:
-
- – en goutte-à-goutte : choisir un modèle de faible débit (moins de 3 L/h). Il n’est pas nécessaire d’accroître le nombre de goutteurs si la durée du tour d’eau le permet. Attention encore aux risques de colmatage des goutteurs !
- -en micro-aspersion : diminuer la pluviométrie en privilégiant des micro-jets à faibles débits et/ou à longues portées de jet.
- Le débit instantané en entrée de réseau peut influer sur le choix du débit par olivier. Un exemple concret permettra d’illustrer l’importance de ce facteur : en vue d’un projet d’irrgation en goutte-à-goutte sur un verger d’oliviers de 6 hectares (220 arbres / ha), un forage a été réalisé. Ce dernier fournit un débit minimal de 10 m3/heure. Par rapport à la configuration du verger, l’oliveraie peut être divisée en 2 postes d’irrigation, chacun faisant 3 hectares. Le producteur envisage d’installer 4 goutteurs de 4 L/h par arbre. En réalité, ce choix n’est pas judicieux du fait de l’insuffisance de débit :
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- – Débit par arbre = débit instantané / nombre d’arbres sur le poste d’irrigation
- – Débit par arbre = 10 000 / (220 x 3) = 15,15 L/h. Le débit par arbre devra être inférieur à 15,15 L/h.
- La durée du tour d’eau est également à prendre en compte. Pour l’illustrer, reprenons l’exemple ci-dessus : sachant que le forage doit également alimenter l’exploitation maraîchère, la durée d’irrigation sur le verger d’oliviers est réduite à 10 heures, soit 5 heures par poste d’irrigation. Le producteur doit enfin songer au débit par arbre qui permettra de répondre aux besoins maximaux (14 m3/ha/jour) :
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- – Débit par arbre = dose par hectare / (nombre d’arbres par hectare x durée d’irrigation par poste)
- – Débit par arbre = 14 000 / (220 x 5) = 12,73 L/h. Le choix du producteur devra se porter sur une installation fournissant un débit par arbre compris entre 12,73 L/h et 15,15 L/h.
Goutteurs intégrés ou en dérivation ?
- Les goutteurs intégrés, encore appelés goutteurs en ligne, correspondent aux goutteurs soudés à intervalle régulier au sein de rampes en polyéthylène. Il est possble de choisir la distance d’implantation des goutteurs dans la rampe. Ce type de dispositif convient d’avantage aux plantations d’âge adulte, pour
lesquelles il est inutile d’ajouter des goutteurs. Le principal inconvénient des goutteurs en ligne réside dans l’impossibilité de renouveler les goutteurs colmatés.
- Les goutteurs en dérivation (ou goutteurs rapportés) sont à implanter en surface des rampes en polyéthylène à l’intervalle souhaité. Aussi, les goutteurs en dérivation sont-ils davantage
adaptés aux jeunes plantations du fait de la possibilité d’ajouter des goutteurs sur la rampe tout au long de la croissance du verger. Dans ce cas, il est impératif de dimensionner le réseau d’irrigation en fonction du débit obtenu une fois la plantation adulte. Ce type de goutteur présente l’inconvénient d’être parfois arraché au cours du déplacement des filets de récolte.
Filtre à tamis, à disques ou à sable ?
- En irrigation localisée, la taille de l’orifice des distributeurs ne permet pas d’évacuer la totalité des particules en suspension dans l’eau. Selon la qualité de l’eau, le colmatage peut être très rapide. La filtration a pour but d’éviter ce type de désagrément.
Type de filtres | Qualité de l’eau | Finesses de filtration | Avantages | Inconvénients |
Filtres hydrocyclone | A réserver aux eaux chargées en sable ou en gravier (eaux de forage, puits) | Retiennent les grosses particules (sable, gravier…)
Protègent les installations d’irrigation d’une usure prématurée Limitent le colmatage des filtres situés en aval du réseau |
N’éliminent pas les particules fines
Inefficaces sur des réseaux comportant des postes de débits différents |
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Filtres à tamis | Convient aux eaux peu chargées en matière organique et en algues
A éviter dans le cas d’eau stagnante (retenues collinaires, plans d’eau) |
Jusqu’à 100 μm
Efficience de l’ordre de 80 % |
Solution économique pour des eaux moyennement chargées | Efficience moyenne |
Filtres à sable | Convient aux eaux chargées en matière organique et en algues | Jusqu’à 100 μm
Efficience variable selon la qualité du sable : de 95 % pour un sable neuf à 70 % pour un sable colmaté |
Bonne efficience après le renouvellement du sable | Renouvellement du sable selon la qualité de l’eau car diminution de la suface de filtration dans le temps
Nécessité de placer un filtre à tamis en aval afin d’arrêter les grains de sable échappés du filtre |
Filtres à disques | Convient aux eaux chargées en matière organique et en algues | Jusqu’à 100 μm
Efficience supérieure à 95 % |
Très bonne efficience
Bonne longévité du filtre |
Nécessité d’automatiser le contre-lavage du filtre en présence d’eaux chargées |
NB : l’efficience de filtration correspond à la part relative de particules arrêtées par le filtre, dont la taille est supérieure à la finesse de filtration.
Le dimensionnement du réseau d’irrigation
- Le réseau d’irrigation doit être conçu de manière à obtenir la meilleure homogénéité de débit sur l’ensemble des distributeurs. Pour cela, la pression de l’eau aux distributeurs doit être la plus plus proche possible pour des distributeurs turbulents, ou comprise dans la plage de régulation pour des goutteurs autorégulants.
- Principe du dimensionnement de réseau : Hsortie filtration = Hgoutteur + ΔZ + ΔHrampe + ΔHporte-rampe + ΔHconduite amenée avec :
-
- – Hsortie filtration : pression en sortie de station de filtration (m),
- – Hgoutteur : pression minimale de fonctionnement du goutteur le plus défavorisé (m),
- – ΔZ : différence d’altitude entre la sortie de filtration et le goutteur le plus défavorisé (m),
- – ΔHrampe : pertes de charge dans les rampes (m),
- – ΔHporte-rampe : pertes de charge dans le porte-rampe (m),
- – ΔHconduite amenée : pertes de charge dans la conduite d’amenée (m).
- Pertes de charges propres aux conduites en polyéthylène : ΔHconduite PE = 1,1 x 0,478 x Q1, 75 x Ø– 4, 75 x L / F avec :
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- – ΔHconduite PE : pertes de charge dans la conduite en polyéthylène (m),
- – Q : débit (L/h),
- – Ø : diamètre intérieur de la canalisation (mm),
- – L : longueur de la canalisation (m),
- – F : coefficient de réduction dû à la distribution de l’eau le long de la canalisation. F est fonction du nombre de distributeurs ou de sorties sur la conduite (N) : si N = 0, F = 1; si N compris entre 50 et 100, F = 2,67; et si N > 100, F = 2,75.
- Pertes de charges propres aux conduites en PVC : ΔHconduite PVC = 1,1 x 0,452 x Q1, 76 x Ø– 4, 76 x L / F avec :
-
- – ΔHconduite PVC : pertes de charge dans la conduite en PVC (m),
- – Q : débit (L/h),
- – Ø : diamètre intérieur de la canalisation (mm),
- – L : longueur de la canalisation (m),
- – F : coefficient de réduction dû à la distribution de l’eau le long de la canalisation. F est fonction du nombre de distributeurs ou de sorties sur la conduite (N) : si N = 0, F = 1; si N compris entre 50 et 100, F = 2,67; et si N > 100, F = 2,75.
- NB : 1 bar = 9,8 mètres de colonne d’eau (mCE)
L’entretien du réseau d’irrigation
- Les particules filtrées créent des pertes de charges au sein des filtres, ce qui s’exprime par une chute des pressions entre l’entrée et la sortie du filtre. Par conséquent, les filtres en entrée de réseau sont à nettoyer dès que la différence de pression est proche de celle fixée par le fabricant. Aussi, faut-il installer deux manomètres, avant et après filtration de l’eau. Les fabricants proposent désormais des filtres autonettoyants.
- Les rampes et porte-rampes sont à purger régulièrement afin d’éliminer les particules accumulées au sein de ces conduites (voir schéma ci-contre).
- Les goutteurs peuvent se colmater par formation de dépôts calcaires. Afin de dissoudre ces concrétions, il est conseillé d’injecter de l’acide nitrique pendant 15 minutes dans le réseau d’irrigation, de sorte à ce que l’eau sortant des distributeurs présente une concentration de 0,5 % d’acide nitrique. Cette injection d’acide nitrique est suivie d’un rinçage à l’eau claire pendant 10 minutes. Afin d’éviter les projections d’acide, ne jamais verser de l’eau dans l’acide !!! Toujours verser l’acide dans l’eau.
- Le réseau d’irrigation doit être placé en hors gel au terme de la campagne d’irrigation.
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