Goût à l’ancienne

Le terme Goût à l’ancienne désigne les huiles d’olive obtenues par fermentation volontaire et contrôlée des olives.

Voir notre guide sur l’élaboration de ce type d’huiles.

Historique

La fermentation des olives a toujours été plus ou moins intégrée, consciemment ou non, dans le processus de trituration. Celle-ci permet un échauffement des olives ainsi qu’une hydrolyse des parois cellulaires de la pulpe, et facilite ainsi grandement la trituration, en particulier dans les moulins à presses. Il est extrêmement difficile de savoir comment était l’huile d’olive au dix-huitième me siècle, mais il semble que les « bonnes » huiles de cette époque avaient un goût approchant les meilleurs huiles « Goût à l’ancienne » que nous connaissons aujourd’hui, puisque leur préparations respectives se ressemblent: Couture dit en 1781: […] la meilleure manière d’extraire l’huile, tant pour la qualité que pour la quantité, consiste a commencer d’en faire la cueillette au commencement de novembre, à les laisser échauffer dans les greniers, quatre à cinq jours, avant de les [triturer]; […]. Cette étape de fermentation peut être considérée comme indispensable, par exemple, si l’on veut obtenir de l’huile en début de saison à partir d’olives tardives à forte teneur en eau, comme des Picholines, dans un moulin à presses. Sans fermentation, la pâte obtenue suite au broyage est très liquide et s’échappe violemment par jets lors de la pression. Il est impossible de faire une extraction correcte. Avec des olives précoces à faible teneur en eau, comme par exemple la tanche de Nyons, cette étape de fermentation est, sur le point de vue de l’extraction, beaucoup moins justifiable. Lors de l’apparition des décanteurs centrifuges, dans les années 1970, cette opération de fermentation est devenue inutile, les pâtes liquides étant tout à fait aptes, en l’état, à la trituration. Les huiles obtenues par ces machines ont dans un premier temps été jugées suspectes, car elles présentaient des caractéristiques inconnues jusqu’alors, en particulier des sensations végétales très marquées, et des arômes de verdure. On attribuait alors logiquement le terme «fruité vert» à ces huiles. Ensuite, il est devenu évident que ces nouveaux appareils permettaient d’explorer de nouveaux horizons aromatiques, car ils permettaient d’obtenir fidèlement les arômes contenus dans l’olive, sans aucune modification liée à la fermentation, dans des olives à forte teneur en eau, ce qui n’était pas possible avec les systèmes à presses. Pendant quelques années, une polémique s’est instaurée entre défenseurs des «huiles de presses» et ceux des «huiles de chaîne». Chaque groupe revendiquait la détention du meilleur savoir faire, et les palmarès des concours dépendaient fortement des préférences des membres des jurys dans cette alternative. Afin de résoudre ce conflit, Christian Pinatel a alors proposé de diviser la production en deux catégories, en dénommant «Goût à l’ancienne» les huiles dominées par les arômes issus de la fermentation des olives. Ensuite, les producteurs ont été invités à déclarer leur catégorie afin que dans les concours leur huile soit comparées avec des huiles produites dans le même esprit. Petit à petit, le fait que les différences de goût sont essentiellement liées au processus de fermentation et non au matériel d’extraction a pu être bien pris en compte, et des moulins équipés de systèmes continus se sont mis à fabriquer des huiles « Goût à l’ancienne« . La dernière étape d’intégration de ce principe, c’est à dire l’équipement en chaînes continues des moulins spécialisés dans la production d’huile « Goût à l’ancienne« , est en cours.

Statut réglementaire

C’est une spécificité française défendue par la profession oléicole française (bien que ce type d’huile ne représente pas de gros tonnages). Les arômes des huiles « Goût à l’ancienne » sont des arômes rappelant typiquement l’olive noire qui, elle aussi, subit une fermentation anaérobie pour être comestible. Le « Goût à l’ancienne » a demandé un défense de la part de la profession française face à la réglementation européenne, qui considère comme défaut toute trace de fermentation. Dans le cas des huiles « Goût à l’ancienne« , les producteurs font volontairement fermenter les olives, par conséquent ce ne peut pas être considéré comme un défaut. Avant l’apparition des systèmes d’extraction modernes, les moulins devaient faire couffir les olives avant trituration afin d’obtenir de bons résultats. Actuellement, le matériel de moulin bien plus performant permet d’obtenir de l’huile à partir d’olives très fraîches, à un faible degré de maturation ou avec un fort taux d’humidité: on obtient du fruité mûr ou du fruité vert selon les variétés et le degré de maturation. Mais il y a un demi-siècle cela n’était pas possible avec de nombreuses variétés: les olives devaient couffir quelques jours pour que les parois cellulaires soient détruites par les enzymes issues de la fermentation, elles devenaient alors plus facile à triturer. Actuellement, cette étape de fermentation n’est plus nécessaire, car le matériel de trituration est plus performant. Mais la maîtrise de cette pratique a permis d’obtenir de bonnes huiles, et des producteurs la mettent en œuvre de nos jours pour reproduire ce « Goût à l’ancienne« . Anciennement, cette fermentation se déroulait dans les greniers. Maintenant, la plupart des moulins utilisent des palox opaques recouverts d’un couvercle. Au bout de quelques heures dans les palox, tout l’oxygène est consommé, et une macération carbonique conduit à des arômes particuliers (cacao, fruits confits, olive noire). Au bout de quelques jours, l’amertume et l’ardence ont disparu et les olives peuvent être triturée. Ce sera une huile « Goût à l’ancienne« .

En cuisine

L’huile « Goût à l’ancienne » peut en principe être utilisé dans toutes les recettes provençales traditionnelles, car le goût correspond à ce que l’on trouvait majoritairement en Provence avant 1970. L’assaisonnement des salades est une utilisation des plus sûre. Ses meilleurs valorisations sont les salades comportant au moins un ingrédient concurrentiel en goût. Nous listons: l’ail, les anchois, les lardons, les gésiers, les crustacés… Une des meilleurs applications reste la frisée aux lardons, bien salée et bien poivrée. On peut obtenir aussi d’excellents résultats avec le fromage de chèvre. À chaud, il est aussi préférable que le plat comporte des éléments forts en goût. Les gambas poëlés à l’huile « Goût à l’ancienne » donnent d’excellents résultats. Pour la ratatouille, c’est une huile bien appropriée. Pour les huiles « Goût à l’ancienne » technologiques (fermentation très courte et à désoxygénation très rapide et totale), les utilisations sont plus polyvalentes, et plus expérimentales. Ces huiles donnent de très bons résultats avec tous les plats à base de riz complet, et s’associent parfaitement avec les desserts.